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Faisaient pleuvoir sur eux sans cesse et sans pitié,
Balles, boulets, cailloux et paquets de mitrailles,
Comme s’ils n’étaient pas de la chrétienté.

   Pour aller arracher au milieu du carnage
Le cadavre sanglant de l’officier tué,
Un seul ne tremble pas, y vole avec courage,
C’est le Cornouaillais ! c’est le brave Corret !

   Intrépide et portant aux balles meurtrières
Un éclatant défi, seul il prend son fardeau ;
S’en charge et le rapporte aux phalanges guerrières,
Applaudissant en chœur un exploit aussi béan.

   Le prince, en apprenant cet acte de courage,
Lui fit offrir par an cent vingt-cinq doublons d’or,
Et la croix de son ordre, éclatant témoignage
Qu’il appréciait plus son acte qu’un trésor.

   Mais plein d’un noble orgueil, l’enfant de la Bretagne
Répondit : Sire, ici grand est mon embarras,
Suivant votre désir, je prends la croix d’Espagne ;
Mais pour votre or, merci, je ne l’accepte pas.

   Après avoir chassé les Anglais de cette île,
Notre Breton gagna la France et son pays
Aux douceurs de l’étude il se livrait tranquille
Tandis qu’un peuple entier s’agitait à Paris.

   Le pouvoir en ces temps de fièvre populaire
Et de destruction s’appelait Comité,
Dit du Salut public, mais souvent le contraire,
De ce titre éclatant au pays fut montré.

   La France allait périr, les masses alarmées
Fuyaient leurs toits fumants et leur sol dévasté ;
Quand par enchantement soudain quatorze armées
Surgissent à la voix de ce fier comité.

   Le comité pria dans cette extrême crise
Latour-d’Auvergne, au nom de la France en danger,
De choisir le premier une armée à sa guise,
Pour chasser l’ennemi, le barbare étranger.

   Corret lui dit : merci, de votre complaisance
Je ne désire plus aujourd’hui commander ;
Mais je connais l’Espagne et là j’ai l’espérance,
Si vous le désirez, un jour de vous aider.

   Douze mille soldats de valeur sans égale
S’y trouvaient par hasard en un corps réunis ;