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COMMENTAIRE


DE LA TROISIÈME MÉDITATION




C’était en 1816. Je n’avais pas encore écrit vingt vers de suite. J’étais à Paris, livré à la dissipation et surtout au jeu, qui a dévoré tant de jours et tant de nuits de mon adolescence. Mes amis partageaient mes égarements ; mais ils étaient tous cependant des jeunes gens d’élite, lettrés, rêveurs, penseurs, jaseurs, poëtes ou artistes, comme moi. Dans les intervalles de loisir et de réflexion que le jeu nous laissait, nous nous entretenions de sujets graves, philosophiques, poétiques, dans les bois de Saint-Cloud, d’Issy, de Meudon, de Viroflay, de Saint-Germain. Nous y portions des poëtes, surtout des poëtes sensibles, élégiaques, amoureux, selon nos âges et selon nos cœurs. Nous les lisions à l’ombre des grands marronniers de ces parcs somptueux.

Un soir, en rentrant d’une de ces excursions, pendant laquelle nous avions relu la strophe unique, mais brûlante, de Sapho, sorte de Vénus de Milo pareille à ce débris découvert par M. de Marcellus, qui contient plus de beauté dans un fragment qu’il n’y en a dans tout un musée de statues intactes, je m’enfermai, et