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ACTE II, SCÈNE II

Un bruit court qu’au milieu de ces gorges profondes
Que défendent les bois, les rochers et les ondes,
Les mornes du Chaos, vastes escarpements,
Sont les points assignés à ces rassemblements.
Mais nul ne peut encore en dire davantage…
L’avalanche se forme au-dessus du nuage !
Pour remplir nos greniers, et pour armer nos forts,
L’escadre impatiente épuise ses renforts ;
La fièvre, tous les jours, nous réduit ; et l’armée,
Dans un cercle fatal, debout, mais enfermée,
Se rongeant sur ce sol qui s’ouvre sous ses pas !
Y cherche un ennemi qu’il ne lui montre pas ! »

leclerc.

Parlez, messieurs, je vais écouter et débattre.

boudet.

Mon avis en deux mots : avancer et combattre !

fressinet.

Combattre ?… contre qui ? Tous les noirs sont soumis,
L’embarras est pour nous d’avoir des ennemis…
D’ailleurs, si par hasard la paix était sincère,
Vous en perdez le fruit en commençant la guerre :
Le grand volcan qui dort dans son calme profond
Éclate si l’on jette un grain de sable au fond !
Emparons-nous plutôt, sans brûler une amorce,
Des postes naturels où cette île a sa force.
Accoutumons ce peuple à nous voir hardiment
Ressaisir le pays et le gouvernement.
Des légitimes chefs reprenons l’attitude ;
L’obéissance, au fond, n’est rien qu’une habitude.
Commandons ! noirs ou blancs, le peuple est ainsi fait ;
Celui qu’il croit son maître est son maître en effet !

ferrand.

Le conseil serait bon dans l’Europe asservie
À ces mille besoins qui composent sa vie,