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CÉSAR.

chaîne : c’est là ce qui effrayé les ennemis et les tient jour et nuit à l’ouvrage.

Quel est donc mon avis ? de faire ce que firent nos ancêtres dans la guerre bien différente des Cimbres et des Teutons. Réfugiés dans leurs villes, réduits et la même disette, plutôt que de se rendre, ils soutinrent leur existence avec les corps de ceux que leur âge ou leur faiblesse rendait inutiles à la défense. Et si nous n’avions pas cet exemple, je dirais que, pour la liberté, il serait glorieux de le transmettre à nos descendants. Car, quelle guerre fut pareille à celle-ci ? Les Cimbres, quand ils eurent ravagé la Gaule et couvert notre pays de calamités, en sortirent enfin et passèrent sur d’autres terres : ils nous laissèrent nos lois, nos mœurs, nos champs, notre liberté. Mais les Romains, conduits par l’envie, que veulent-ils ? que cherchent-ils autre chose que de se fixer dans nos campagnes et dans nos villes et de soumettre à un joug éternel des peuples que la renommée leur disait illustres et belliqueux ? Ils n’ont jamais eu d’autre but dans leurs guerres ; et, si vous ignorez leur politique chez les nations éloignées, considérez la Gaule qui vous est voisine : son droit et ses lois sont changés, elle est sous la hache et, réduite en province, elle gémit dans une servitude sans terme. »

Les voix recueillies, il fut résolu qu’on ferait sortir de la place toutes les bouches inutiles, et qu’on tenterait tout avant de suivre l’avis de Critognat ; cependant, si les secours tardaient trop, on s’y conformerait plutôt que d’en venir à capituler.

Les Mandubiens, citoyens d’Alésia, avec leurs femmes et leurs enfants, se virent chassés de leur ville par les soldats qu’ils y, avaient reçus ; ils s’avancèrent en pleurant vers les lignes des Romains, « suppliant qu’on les prît pour esclaves et qu’on leur donnât des vivres. » César plaça des