Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 34.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
66
CICÉRON.

n’est personne ici qui ignore que la veille des calendes de janvier, le dernier jour du consulat de Lépidus et de Tullus, tu te trouvas sur la place des comices, armé d’un poignard ? que tu avais aposté une troupe d’assassins pour tuer les consuls et les principaux citoyens ? que ce ne fut ni le repentir ni la crainte, mais la fortune du peuple romain, qui arrêta ton bras et suspendit ta fureur ? Je n’insiste point sur ces premiers crimes ; ils sont connus de tout le monde, et bien d’autres les ont suivis. Combien de fois, et’depuis mon élection, et depuis que je suis consul, n’as-tu pas attenté à ma vie ? Combien de fois n’ai-je pas eu besoin de toutes les ruses de la défense, pour parer des coups que ton adresse semblait rendre inévitables ? Il n’est pas un de tes desseins, pas un de tes succès, pas une de tes intrigues dont je ne sois instruit à point nommé. Et cependant, rien ne peut lasser ta volonté, décourager tes efforts. Combien de fois ce poignard dont tu nous menaces a-t-il été arraché de tes mains ? Combien de fois un hasard imprévu l’en a-t-il fait tomber ? Et cependant il faut que ta main le relève aussitôt. Dis-nous donc sur quel affreux autel tu Pas consacré, et quel vœu sacrilège t’oblige à le plonger dans le sein d’un consul !

À quelle vie, Catilina, es-tu désormais condamné ? Car je veux te parler en ce moment, non plus avec l’indignation que tu mérites, mais avec la pitié que tu mérites si peu. Tu viens d’entrer dans le sénat : en bien, dans une assemblée si nombreuse, où tu as tant d’amis et de proches, quel est celui qui a daigné te saluer ? Si personne avant toi n’essuya jamais un tel affront, pourquoi attendre que la voix du sénat prononce le flétrissant arrêt si fortement exprimé par son silence ? N’as-tu pas vu a ton arrivée tous les sièges rester vides autour de toi ? N’as-tu pas vu tous ces consulaires, dont tu as si souvent résolu la mort, quitter leur place quand tu t’es assis, et