Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 5.djvu/183

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La lame en vain dans la carrière
Battait en grondant ses sabords ;
Il la renvoyait en poussière,
Comme un coursier sème en arrière
La blanche écume de son mors !

« Longue course à l’heureux navire ! »
Disais-je ; en trois bonds il a fui !
La vaste mer est son empire,
Son horizon n’a que sourire,
Et l’univers est devant lui !

Mais, d’une humble voile sur l’onde,
Si je distinguais la blancheur,
Esquif que chaque lame inonde,
Seule demeure qu’ait au monde
Le foyer flottant du pêcheur ;

Lorsqu’au soir sur la vague brune,
La suivant du cœur et de l’œil,
Je m’attachais à sa fortune,
Et priais les vents et la lune
De la défendre de l’écueil ;

Sous une voile dont l’orage
En lambeaux déroulait les plis,
Je voyais le frêle équipage
Disputer son mât qui surnage
Aux coups des vents et du roulis.