Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/106

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monastères qui se trouvent dans leurs juridictions. Ces juridictions sont très-restreintes : chaque grand village a son évêque.

Le peuple maronite, soit qu’il descende des Arabes ou des Syriens, participe de toutes les vertus de son clergé, et forme un peuple à part dans tout l’Orient ; on dirait d’une colonie européenne jetée par le hasard au milieu des tribus du désert. Sa physionomie cependant est arabe : les hommes sont grands, beaux, au regard franc et fier, au sourire spirituel et doux ; les yeux bleus, le nez aquilin, la barbe blonde, le geste noble, la voix grave et gutturale, les manières polies sans bassesse, le costume splendide et les armes éclatantes.

Quand vous traversez un village, et que vous voyez le scheik assis à la porte de son manoir crénelé, ses beaux chevaux entravés dans sa cour, et les principaux du village vêtus de leurs riches pelisses, avec leurs ceintures de soie rouge remplie de yatagans et de kandgiars aux manches d’argent, coiffés d’un immense turban composé d’étoffes de diverses couleurs, avec un large pan de soie pourpre retombant sur l’épaule, vous croiriez voir un peuple de rois. Ils aiment les Européens comme des frères ; ils sont liés à nous par ce lien de la communauté de religion, le plus fort de tous ; ils croient que nous les protégeons, par nos consuls et nos ambassadeurs, contre les Turcs ; ils reçoivent dans leurs villages nos voyageurs, nos missionnaires, nos jeunes interprètes, qui vont s’instruire dans la langue arabe, comme on reçoit des parents éloignés dans une famille ; le voyageur, le missionnaire, le jeune interprète, deviennent