Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/131

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faitement simples et pures. Je n’ai vu aucune population au monde portant sur ses traits plus d’apparence de santé, de noblesse et de civilisation, que ces hommes du Liban. L’instruction du peuple, bien que bornée à la lecture, à l’écriture, au calcul, au catéchisme, y est universelle, et donne aux Maronites un ascendant légitime sur les autres populations syriennes. Je ne saurais les comparer qu’aux paysans de la Saxe et de l’Écosse.

Nous revînmes à Bayruth par le bord de la mer. Les montagnes qui bordent la côte sont couvertes de monastères construits dans le style des villas florentines du moyen âge. Un village est planté sur chaque mamelon, couronné d’une forêt de pins parasols, et traversé par un torrent qui tombe en cascade brillante au fond d’un ravin. De petits ports de pêcheurs sont ouverts sur toute cette côte dentelée, et remplis de petites barques attachées aux môles ou aux rochers. De belles cultures de vigne, d’orge, de mûriers, descendent des villages à la mer. Les clochers des monastères et des églises s’élèvent au-dessus de la sombre verdure des figuiers ou des cyprès ; une grève de sable blanc sépare le pied des montagnes de la vague, limpide et bleue comme celle d’une rivière. Il y a deux lieues de pays qui tromperaient l’œil du voyageur, s’il ne se souvenait qu’il est à huit cents lieues de l’Europe : il pourrait se croire sur les bords du lac de Genève, entre Lausanne et Vevay, ou sur les rives enchantées de la Saône, entre Mâcon et Lyon ; seulement le cadre du tableau est plus majestueux à Antoura, et quand il lève les yeux, il voit les cimes de neige du Sannin, qui fendent le ciel comme des langues d’incendie…