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de ces tribus à notre égard : j’aurais amené des ouvriers et des chameaux de charge, et enrichi la science et les musées.

Nous allâmes, en sortant des temples, au palais de l’émir. Un intervalle de ruines désertes, mais moins importantes, sépare la colline des grands temples, ou l’Acropolis de Balbek, de la nouvelle Balbek, habitée par les Arabes. Celle-ci n’est qu’un monceau de masures cent fois renversées dans des guerres incessantes ; la population s’est nichée comme elle a pu dans les cavités formées par tant de débris ; quelques branches d’arbre, quelques toits de chaume recouvrent ces demeures, dont les portes et les fenêtres sont formées souvent avec des morceaux des plus admirables débris.

L’espace occupé par les ruines de la ville moderne est immense ; il s’étend à perte de vue, et blanchit deux collines basses qui ondulent au-dessus de la grande plaine : l’effet en est triste et dur. Ces débris modernes rappellent ceux d’Athènes, que j’avais vus une année auparavant. Le blanc mat et cru de ces murailles couchées à terre, et de ces pierres disséminées, n’a rien de la majesté ni de la couleur dorée des ruines véritablement antiques ; cela ressemble à une immense grève couverte de l’écume de la mer. Le palais de l’émir est une assez vaste cour, entourée de masures de diverses formes ; le tout assez semblable à une cour de misérable ferme, dans nos provinces les plus pauvres. La porte était gardée par un certain nombre d’Arabes armés ; la foule se pressait pour y entrer ; les gardes nous firent place et nous introduisirent. La cour était déjà remplie de tous les chefs de la tribu et d’une grande multitude de