Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

soleil commençait à dorer leurs faîtes, et ils brillaient sous nos pieds, dans la plaine, comme des blocs d’or ; nous ne pouvions en détacher nos regards ; nous nous arrêtâmes vingt fois avant d’en perdre tout à fait la vue ; enfin ils disparaissent pour jamais sous la colline, et nous ne voyons au delà du désert que les cimes noires ou neigeuses des montagnes de Tripoli et de Latakieh, qui se fondent dans le firmament.

Les montagnes peu élevées d’abord que nous traversons sont entièrement nues et presque désertes. Le sol en général est pauvre et stérile : la terre, là où elle est cultivée, est de couleur rouge. Il y a de jolies vallées à pentes douces et ondoyantes, où la charrue pourrait se promener sans obstacles. Nous ne rencontrons ni voyageurs, ni villages, ni habitants, jusque vers le milieu du jour. Nous faisons halte sous nos tentes, à l’entrée d’une gorge profonde où coule un torrent, alors à sec. Nous trouvons une source sous un rocher : l’eau est abondante et délicieuse ; nous en remplissons les jarres suspendues aux selles de nos chevaux. Après deux heures de repos, nous nous remettons en marche.

Nous côtoyons, par un sentier rapide et escarpé, le flanc d’une haute montagne de roche nue, pendant environ deux heures. La vallée, qui se creuse de plus en plus à notre droite, est sillonnée par un large lit de fleuve sans eau. Une montagne de roche grise, et complétement dépouillée, s’élève de l’autre côté, comme une muraille perpendiculaire. Nous recommençons à descendre vers l’autre embouchure de cette gorge. Deux de nos chevaux, chargés de bagages, roulent dans le précipice. Les matelas et tapis de divan,