Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/213

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le poste ; il la lut, la porta à son front et à ses lèvres, et nous fit entrer avec force excuses et compliments.

Nous errâmes quelque temps dans un labyrinthe obscur de ruelles sales et étroites ; de petites maisons basses, dont les murs de boue semblaient prêts à s’écrouler sur nous, formaient ces rues ; nous voyions aux fenêtres, à travers les treillis, de ravissantes figures de jeunes filles arméniennes qui, accourues au bruit de notre longue file de chevaux, nous regardaient passer, et nous adressaient des paroles de salut et d’amitié. Nous nous arrêtâmes enfin à une petite porte basse et étroite, dans une rue où l’on pouvait à peine passer ; nous descendîmes de cheval, nous franchîmes un corridor sombre et surbaissé, et nous nous trouvâmes, comme par enchantement, dans une cour pavée de marbre, ombragée de sycomores, rafraîchie par deux fontaines moresques, et entourée de portiques de marbre et de salons richement décorés : nous étions chez M. Baudin. Cette maison est, comme toutes les maisons de chrétiens de Damas, une masure au dehors, un palais délicieux au dedans. La tyrannie de la populace fanatique force ces malheureux à cacher leur richesse et leur bien-être sous les apparences de la misère et de la ruine. On déchargea nos bagages à la porte, on remplit la cour de nos hardes, de nos tentes, de nos selles, et l’on conduisit nos chevaux au kan du bazar.

M. Baudin nous donna à chacun un joli appartement meublé à la manière des Orientaux, et nous nous reposâmes, sur ses divans et à sa table hospitalière, des fatigues d’une si longue route. Un homme connu et aimé, rencontré