Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/272

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nous venions ensuite, puis la longue file de nos moukres et de nos saïs.

La sortie de Tripoli offre un admirable point de vue ; on suit les bords d’un fleuve encaissé entre deux collines ; les plus beaux arbres et des forêts de grands orangers ombragent les bords de l’eau ; un kiosque public, bâti sous ces arbres, offre sa terrasse embaumée aux promeneurs ; on y vient fumer et prendre le café, pour respirer la fraîcheur du lit du fleuve ; de là, par une échappée, on aperçoit la mer, qui est à une demi-lieue de la ville ; les belles tours carrées, bâties par les Arabes, aux deux flancs du port, et les nombreux navires qui sont dans la rade.

Nous traversâmes une large plaine cultivée et plantée d’oliviers ; sur le premier coteau qui s’élève de cette plaine vers le Liban, au milieu d’une forêt d’oliviers et d’arbres fruitiers de toute espèce, nous rencontrâmes une immense foule d’hommes, de femmes et d’enfants qui bordaient la route ; c’étaient les habitants d’un grand village répandu sous ces arbres, et qui appartient au scheik d’Éden ; il passe les étés à Éden, et les hivers dans ce village de la plaine. Ces Arabes saluèrent respectueusement leur prince, nous offrirent des rafraîchissements, et un certain nombre d’entre eux se mit en route avec nous pour nous conduire des veaux et des moutons, et nous aider à franchir les précipices des montagnes : pendant quatre heures ensuite nous marchâmes, tantôt dans de profondes vallées, tantôt sur la crête de montagnes presque stériles ; nous fîmes halte au bord d’un torrent qui descend des sommets d’Éden, et qui roulait des monceaux de neige à demi fondue. À l’abri d’un rocher, le