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groupes fameux des cèdres ; ils couronnent, comme un diadème, le front de la montagne ; ils voient l’embranchement des nombreuses et grandes vallées qui en descendent ; la mer et le ciel sont leur horizon. Nous mettons nos chevaux au galop dans la neige, pour approcher le plus près possible de la forêt ; mais, arrivés à cinq ou six cents pas des arbres, nous enfonçons jusqu’aux épaules des chevaux ; nous reconnaissons que le rapport de nos Arabes est exact, et qu’il faut renoncer à toucher de la main ces reliques des siècles et de la nature ; nous descendons de cheval, et nous nous asseyons sur un rocher pour les contempler.

Ces arbres sont les monuments naturels les plus célèbres de l’univers. La religion, la poésie et l’histoire les ont également consacrés. L’Écriture sainte les célèbre en plusieurs endroits. Ils sont une des images que les prophètes emploient de prédilection. Salomon voulut les consacrer à l’ornement du temple qu’il éleva le premier au Dieu unique, sans doute à cause de la renommée de magnificence et de sainteté que ces prodiges de végétation avaient dès cette époque. Ce sont bien ceux-là ; car Ézéchiel parle des cèdres d’Éden comme des plus beaux du Liban. Les Arabes de toutes les sectes ont une vénération traditionnelle pour ces arbres : ils leur attribuent non-seulement une force végétative qui les fait vivre éternellement, mais encore une âme qui leur fait donner des signes de sagesse, de prévision, semblables à ceux de l’instinct chez les animaux, de l’intelligence chez les hommes. Ils connaissent d’avance les saisons, ils remuent leurs vastes rameaux comme des membres, ils étendent ou resserrent leurs coudes, ils élèvent vers le ciel ou inclinent vers la terre leurs branches, selon