Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/312

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seraient que des répétitions, et je quitte à regret un sujet vers lequel mes souvenirs me reportent sans cesse ; je ne dirai qu’un mot, tout à fait indépendant des souvenirs religieux, sur l’aspect de ce village des tombeaux (Siloa), qui m’est resté comme un tableau devant les yeux. Cette population entière d’Arabes sauvages, demeurant dans des caves et des grottes sépulcrales, offrirait à un peintre une scène des plus originales. Qu’on se figure, dans la profonde vallée de Siloa, des cavernes présentant leurs ouvertures comme des bouches de fours les uns sur les autres, disséminés sur le flanc d’un rocher, ou comme des sections irrégulières d’une ruche brisée ; et, de ces caves sépulcrales, des êtres vivants, des femmes, des enfants, sortant comme des fantômes de la demeure des morts. — Je ne sais si ce sujet a été traité, mais il me semble qu’il offre au pinceau, à la fois, tous les contrastes et toutes les harmonies.

» Le 26 avril, nous jetons nos derniers regards sur Jérusalem, — et nous reprenons tristement le chemin de Jaffa. — En entrant dans la vallée de Jérémie, les sons d’une musique sauvage attirent notre attention : nous apercevons dans le lointain toute une tribu arabe défilant sur le flanc du coteau ; — j’envoie le drogman en avant ; — il revient nous dire que tout ce monde est assemblé pour l’enterrement d’un chef, et que nous pouvons avancer sans crainte. — Il nous raconte ensuite que ce chef est mort soudainement la veille à la chasse, pour avoir respiré une plante vénéneuse ; mais le caractère connu des Arabes de Naplouse, dont ceux-ci portent le costume, nous fit penser qu’il était plutôt tombé victime de la jalousie de quelque chef rival. — Malgré leurs habitudes guerrières et leur air imposant, la crédulité de