Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/437

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cend comme dans des ravines de montagnes, et vient se confondre avec celle des fossés. Presque partout son sommet est couronné de végétation qui déborde, et forme un bourrelet de plantes, des chapiteaux et des volutes de lianes et de lierres. Çà et là, du sein des tours comblées par les pierres et la poussière, s’élance un platane ou un cyprès qui entrelace ses racines à travers les fentes de ce piédestal. Le poids des branches et des feuilles, et les coups de vent dont ces arbres aériens sont sans cesse battus, font incliner leurs troncs vers le midi, et ils pendent comme des arbres déracinés avec leurs vastes branchages chargés de nids d’une multitude d’oiseaux. Tous les trois ou quatre cents pas, on rencontre une des tours accouplées, d’une magnifique construction, avec les énormes voûtes d’une porte ou d’un arc antique entre ces tours. La plupart de ces portes sont murées aujourd’hui, et la végétation, qui a tout envahi, murs, portes, créneaux, tourelles, forme dans ces endroits ses plus bizarres et ses plus beaux accouplements avec les ruines et les œuvres de l’homme. Il y a des pans de lierre qui descendent du sommet des tours, comme des plis d’immenses manteaux ; il y a des lianes formant des ponts de verdure de cinquante pieds d’arche d’une brèche à l’autre ; il y a des parterres de giroflées, semés sur des murs perpendiculaires, que le vent balance sans cesse comme des vagues de fleurs ; des milliers d’arbustes forment des créneaux dentelés de feuillages et de couleurs divers. Il sort de tout cela des nuées d’oiseaux, quand on jette une pierre contre les flancs des murs tapissés, ou dans les abîmes des fourrés qu’on a à ses pieds. Nous vîmes surtout un grand nombre d’aigles qui habitent les tours, et qui planent tout le jour au soleil, au-dessus des aires où ils nourrissent leurs petits, etc.