Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/444

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M. Truqui et les jeunes Grecs de son consulat ont voulu nous accompagner. Nous nous séparons là. Nous embrassons cet excellent homme, qui a été pour nous une providence dans ces jours d’isolement. Dans le désespoir, une amitié de deux mois est pour nous une amitié de longues années. Que Dieu récompense et console les dernières années de cet homme de consolation ! Qui sait si nous nous reverrons ici-bas ? Nous partons pour une longue et chanceuse pérégrination. Il reste triste et malade, loin de sa femme et de sa patrie. Il veut en vain nous cacher ses larmes, et les nôtres mouillent sa main tremblante.

Nous faisons halte à trois lieues de Constantinople pour laisser passer la chaleur du jour. Nous avons traversé un pays onduleux de coteaux qui dominent la mer de Marmara. Peu de maisons, disséminées dans les champs ; point de villages. Nous nous remettons en route à quatre heures ; et, suivant toujours les collines basses, larges et nues, nous arrivons à une petite ville où nos Tartares, qui nous devancent, nous ont fait préparer une maison. Cette maison appartient à une famille grecque, famille charmante : trois femmes gracieuses ; enfants d’une beauté admirable. Ils étendent des tapis et des coussins sur le plancher de bois de sapin pour la nuit. Mon cuisinier trouve à se procurer du riz, des poules et des légumes en abondance. — Notre caravane est sur pied à trois heures du matin. Un de mes Tartares marche pendant quelques heures à la tête de la troupe. Après le repos du milieu du jour, que nous prenons au bord d’une fontaine ou sous quelque masure de caravansérai, il prend mes ordres, et va au galop dans la ville ou dans le village où nous devons coucher. Il porte mes lettres du