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aucun meuble, si ce n’est des jarres de terre noirâtres, couchées sur le flanc, dans lesquelles les femmes vont puiser l’eau ; quelques outres de peau de chèvre, des sabres et de longs fusils suspendus en faisceaux aux branches des arbres, les nattes, les tapis, et quelques vêtements d’hommes ou de femmes, jetés çà et là sur le sol. Quelques-uns de ces Arabes avaient deux ou trois coffres carrés, de bois peint en rouge, avec des dessins de clous à tête dorée, pour contenir leurs effets. Je ne vis que deux ou trois chevaux dans toute la tribu. Le plus grand nombre des familles n’avait autour de la tente qu’un chameau couché, ruminant avec sa haute tête intelligente, dressée et tendue vers la porte de la tente, quelques belles chèvres aux longues soies noires et aux oreilles pendantes, des moutons et des buffles : presque tous avaient en outre un ou deux magnifiques chiens lévriers, de grande taille et à poil blanc. Ces chiens, contre la coutume des mahométans, étaient gras et bien soignés : ils semblaient reconnaître des maîtres, d’où je présume que ces tribus s’en servaient pour la chasse.

Les scheiks paraissaient jouir d’une autorité absolue, et le moindre signe de leur part rétablissait l’ordre et le silence, que le tumulte de notre arrivée avait troublés. Quelques enfants ayant commis, par curiosité, de légères indiscrétions envers nous, ils les firent saisir à l’instant par les hommes qui nous entouraient, et chasser loin de nous, vers un autre quartier du camp. Les hommes étaient généralement grands, forts, beaux et bien faits ; leurs habits n’annonçaient pas la pauvreté, mais la négligence. Plusieurs avaient des vestes de soie mêlée de fils d’or ou d’argent, et des pelisses de soie bleue, doublées de riches fourrures. Leurs