Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/71

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« Ô weyvode Milosch, frère chéri,
Le sommeil pèse sur mes yeux :
Chante, mon frère, pour me réveiller !… »
Et le weyvode Milosch lui répondit :
« Ô mon frère, Marko, fils de roi,
Volontiers je chanterais, mon frère ;
Mais j’ai beaucoup bu de vin naguère
Avec la Wila de la verte forêt ;
Et en me menaçant la Wila m’avertit
Que si jamais elle m’entendait chanter,
Elle me percerait de ses flèches,
Non-seulement la gorge, mais le cœur. »
Toutefois Marko, fils de roi, répondit :
« Chante, frère ; ne crains pas la Wila ;
Non, tant que Marko, fils de roi, vivra,
Moi, mon bon cheval le Scharatz,
Et ma rapide et pesante massue dorée,
Ne crains point la Wila, frère ! »
Alors le weyvode commença à chanter ;
Et ce fut un beau chant que celui qu’il commença
Sur nos pères et nos héros,
Lorsque jadis ils possédaient un royaume,
Et que dans la glorieuse Macédoine
Ils fondaient de pieux monastères pour se sanctifier.
Mais, quelque agréable que fût le chant à Marko,
Il tomba endormi sur le pommeau de sa selle.

Marko dormait, Milosch chantait ;
Voilà que la Wila Rawjolila l’entendit,
Et elle commença un double chant avec Milosch.