Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/219

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seau de cet homme est aussi un coup de sa pensée dans ses tempes pour les élargir à la proportion de la grande idée dont il est malade. Je me demandais à moi-même consciencieusement, à moi qui ai usé ma langue sous mon palais et mes yeux sous mes paupières à lire, à écrire et à parler de ce Dieu dans toutes les fois et dans toutes les langues, quelles pouvaient être les notions que cette âme inculte avait pu concevoir à elle seule du souverain Être.

J’étais donc naturellement porté, quand je me retrouvais avec lui, à faire revenir l’entretien sur ce sujet. D’ailleurs, je voyais que c’était la pente aussi de son âme débordante de piété instinctive, et que, pour peu qu’on l’y inclinât, elle y versait. Je m’assis donc à la même place où j’avais parlé avec lui de Denise, et, quand il eut fini de mettre sa ruche d’aplomb sur ses cales, il revint s’y asseoir lui-même à une certaine distance en face de moi car, bien que Claude fût confiant et simple dans son attitude et dans son langage, il n’était point familier. Il avait cette convenance naturelle qui commande tous les respects en les observant. Il maintenait ses distances comme un bon fantassin, qui ne doit ni se laisser atteindre par celui qui marche derrière lui, ni marcher