Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/262

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de mon retour au pays, aux Huttes, je m’enfonçai un peu à l’écart du sentier contre une roche, et je me mis la tête dans mes mains pour réfléchir. Non, que je me dis, je ne peux pas retourner, c’est trop avancé ; il y a des cordes qui me tirent le cœur, tellement que mon cœur y resterait si j’essayais de tirer de l’autre côté. Je verrai demain la maison de ma mère, je saurai qui vit ou qui meurt sous le toit de mon père ; je ne m’en irai pas sans que la voix de Denise ait encore une fois réjoui mon oreille, si Denise vit encore du moins ! Mais je ne me ferai pas voir, j’attendrai ici que la nuit soit venue, je marcherai nu-pieds, je retiendrai mon souffle pour ne pas éveiller le chien, je m’approcherai comme un voleur, hélas ! pour voler un seul coup d’œil sur ceux que j’ai tant aimés et tant regrettés.

XIII.

Comme je parlais ainsi en dedans de moi, le visage vers la terre, sans rien voir et sans rien écouter du dehors, voilà que j’entends une voix toute cassée qu’il me semble reconnaître et qui me crie du sen-