Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/33

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trente-six à quarante ans, de taille moyenne, de stature plutôt grêle et un peu courbée en avant, comme celle d’un manœuvre accoutumé à se plier sous le poids de choses lourdes. Ses jarrets n’avaient pas la vigueur élastique, les muscles tendus des chasseurs de chevreuils de nos Alpes, ils penchaient en avant, comme ceux de l’ouvrier qui s’agenouille souvent pour son travail. Une de ses épaules était beaucoup plus élevée, plus nouée et plus forte que l’autre c’était celle où s’emmanchait le bras droit, qui lève et qui abaisse sans cesse le marteau. Bien que ses bras fussent maigres, et bien que les manches qui n’en couvraient que la moitié en laissassent voir les veines, les tendons et les muscles presque à nu, ses mains étaient longues, massives, nouées aux articulations, rudes d’écorce comme des tenailles. L’habitude de remuer, de tourner, de façonner les grosses pierres, avait développé et endurci chez lui ce premier outil de l’homme, la main. Il les laissait pendre comme deux balanciers inertes, qui l’embarrassaient visiblement quand il ne portait rien. Ses pieds nus et larges, dont les orteils, puissamment prononcés, mordaient le sol, s’imprimaient devant moi sur le sable de