Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/62

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de granit plus hauts que le reste de l’enceinte. Leurs fleurs tardives, qui commençaient cependant a tomber, pleuvaient par flocons à chaque ébranlement insensible de l’air. Ils faisaient flotter une ombre légère entremêlée de clarté sur le gazon.

La nature sait combien les dernières cimes des montagnes sont froides et battues des vents. Elle n’y fait croître que des arbustes à maigre feuillage, dont l’ombre légère et mobile n’est qu’un éventail étroit et transparent sur la face de la terre. Cette ombre des pruniers et des cerisiers en fleur n’atteignait pas les pieds du tailleur de pierre endormi. Contre les blocs, derrière ces arbres, on voyait sept ruches avec un petit toit pointu de paille, portées sur autant de pierres qui leur servaient de piédestal pour les préserver de l’humidité pendant les pluies. Ces ruches, pleines d’essaims, bruissaient sourdement comme une flamme dans le bois vert ; les abeilles, réchauffées par le soleil, sortaient et rentraient en foule, volant autour de l’homme et se posant même sur son bras et sur son front sans le piquer, car elles connaissent, comme les animaux domestiques, la main qui les nourrit. Une énorme fourmilière s’élevait tout auprès de la tête du paysan. Son bâton n’avait pas voulu la