Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/72

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présence du bon Dieu, qui peuple pour vous le désert et qui vous entretient comme un invisible ami ?

Lui. — Je ne sais pas non plus, monsieur ; je pense que c’est une bonté qu’il a eue pour moi voyant que j’étais destiné à vivre si, haut, ici, sans femme ni enfants, sans père ni mère, de venir me visiter plus souvent et de plus près qu’un autre, pour me consoler et pour m’empêcher de m’ennuyer de la vie.

Moi. — Vous ne vous ennuyez donc pas trop dans cet ermitage, au milieu des brouillards, des neiges et des grands vents, du silence, de la solitude ?

Lui. — Oh ! non, monsieur, jamais je ne m’ennuie. Est-ce qu’on peut s’ennuyer dans la société de Celui qui sait tout, qui dit tout, qui écoute tout ce que nous avons à lui dire, et qui ne se fatigue jamais de nous entendre et de nous répondre dans le cœur ?

Moi. — Non ; mais il faut une grande concentration d’esprit à une grande élévation sur les hauteurs de l’âme pour n’être pas distrait de cette conversation intérieure avec le bon Dieu, pour n’être pas assourdi