Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/93

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coupables, pour les pauvres, pour les riches, pour les vieillards, pour les veuves, pour les enfants, pour les hommes, pour les bêtes, pour les plantes, pour la terre même et pour les étoiles du ciel, si ces éléments eux-mêmes ont une sensibilité sourde ou intelligente, et si tout cela sent, crie et souffre à sa manière comme nous. Hélas ! monsieur, je crois bien que c’est là ce que le bon Dieu commande et inspire le plus à nous autres hommes. Car, sans cette miséricorde des uns pour les autres, que deviendrions-nous tous sur une terre si pétrie d’afflictions ?

Moi. — Dieu me préserve de vous contredire, Claude ! vous voyez que, dans toutes les religions, les plus saintes et les plus divines victimes sont celles qui ont éprouvé le plus de cette miséricorde, qui n’est que l’attendrissement de cet amour pour nos semblables, et qui se sont sacrifiées elles-mêmes pour racheter une vérité ou une vertu au genre humain. Ce qu’il y a de plus généreux dans le cœur de l’homme, c’est la pitié, Claude ! Pleurer sur les souffrances d’autrui, c’est se faire saigner le cœur sur des maux dont on pourrait détourner ses yeux ! Après son sang, ce que l’homme peut donner de plus