Page:Lamartine - Le tailleur de pierres de Saint-Point, ed Lecou, Furne, Pagnerre, 1851.djvu/95

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passée, et qui n’a pas un pauvre liard pour payer le tireur de pierre, le maçon et le couvreur pour se rebâtir un abri ; voilà ce vieillard qui n’a plus son fils pour lui piocher son morceau de terre voilà ces trois orphelins qui n’ont ni père ni mère pour leur moissonner leur seigle ou pour leur battre leur châtaignier ; voilà la cheminée d’un tel qui est tombée ; voilà la porte, voilà l’escalier, voilà la fenêtre de celui-là ou de celle-là qui se sont éboulés, et qui les font courir vainement après le tailleur de pierre, sans argent d’ici à l’année prochaine pour lui payer ses journées. Que vont-ils faire dans la mauvaise saison qui s’avance ? Qui est-ce qui ira à leur secours pour l’amour de Dieu ? Allons, c’est moi ! Donnons-nous de la peine pour leur en enlever un peu ! Tirons de la pierre pour celle-ci, taillons un jambage pour celui-là, rajustons les marches de l’escalier pour l’un, replaçons les solives et les tuiles pour l’autre, piochons la vigne de ce voisin malade, coupons l’orge de cette vieille femme aveugle, prêtons la chèvre à cette pauvre nourrice dont la vache est tombée dans le ravin et qui n’a plus de lait pour ses petits ! Le peu que je puis pour eux leur soulagera le cœur ; ils auront moins de chagrin