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Page:Lamirault - La Grande encyclopédie, inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts, tome 10.djvu/580

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CHAPITEAU

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volutes entrecroisées, lesquelles portent un abaque composé de plusieurs tablettes minces saillant l’une sur l’autre et sont reliées au lût du pilier par une série d’annelets qui deviendront aussi bien les annelets des chapiteaux doriques grecs que les astragales des chapiteaux en général. Enfin M. Botta (Ruines de Ninive, pi. 1 4 -1) , et M. Layard (the Monuments of Nineveh, pi. 40), ont découvert et étudié, dans les bas-reliefs du palais de Sargon à Khorsabad (vm e siècle avant notre ère) et du palais nord de Koyoundjick, des chapiteaux à volutes accentuées portant un tailloir et surmontant un petit ordre de colonnes. Au reste, dans toute l’Asie Mineure, aussi bien dans les fragments ou les représentations d’architecture que dans les débris de meubles ou de poteries et les objets de métal, des volutes ioniques figurent comme motifs décoratifs dès la plus haute antiquité. — La Perse, soumise d’abord à l’influence chaldéo-assyrienne et peut-être à l’influence indienne, avant de l’être aux influences égyptienne et grecque, offre,

dans les colonnes de la grande

Salle royale de Persépolis,

la ville favorite des Achémé-

nides (fin du vi e siècle avant

notre ère), un type bien cu-

rieux de chapiteaux et dont,

depuis la dernière mission

de M. et M me Dieulafoy, le

Musée du Louvre possède un

modèle (fig. 2). Ce chapiteau,

très allongé, car, complet, il

mesure près de 8 m. c.-à-d.

presque autant de hauteur

que le fut de la colonne

qu’il surmonte, comprend

trois parties distinctes : une

partie inférieure composée de

deux sortes de campanes su-

perposées, mais se joignant

par leur base ; une partie mé-

diane formée de quatre con-

soles se terminant en haut et

en bas par de doubles volutes

et enfin une partie supérieure composée de deux taureaux accouplés l’un à l’autre, sur les croupes desquels est figuré l’about d’une poutre transversale et dont les tètes semblent, comme de puissantes consoles, porter l’architrave. D’autres chapiteaux, encore en place dans cette même résidence royale, ne comportent que cette dernière partie dans laquelle, parfois, des licornes remplacent des taureaux. — Avant de quitter l’Asie, il faut remarquer, en dehors de tous couronnements de pilastres exubérants de sculptures et réellement fantastiques que l’on trouve dans les monuments de l’Inde et particulièrement dans ceux d’Ellora, quelques types de chapiteaux des temples indiens, types probablement imités de la construction en bois quoique sculptés dans le roc et offrant soit une sorte de sphère aplatie surmontée de consoles, soit une sorte de lambrequin retombant au-dessous d’un tailloir carré, sur le fût orné de la colonne. Mais ces formes, d’une date incertaine (peut-être même du commencement de notre ère), n’eurent aucune influence sur l’art grec, duquel plutôt on peut les croire inspirées. — Quant à l’extrême Orient, Chine ou Japon, avec ses supports et ses linteaux de bois décorés, il ne comporte que des assemblages relevant de la charpente et nullement les éléments constitutifs du chapiteau.

Grèce. A l’embrasser dans tous ses détails, l’étude du chapiteau grec, qu’il soit dorique, ionique ou corinthien, et quoique ce dernier chapiteau n’ait reçu son entier développement que dans l’architecture romaine, l’étude du chapiteau grec entraînerait presque une étude complète des ordres et de l’architecture des édifices grecs ; mais, en renvoyant aux mots Architecture grecque, Colonne et Ordre, ainsi qu’aux mots Abaque, Armilles, Echine,

Fitr. 2. — Chapiteau à tau-

reaux accouplés (Je Per-

sépolis.

Volute, Calathus, Caulicoles, etc., nous nous bornerons à résumer les données primordiales des chapiteaux surmontant les colonnes des trois principaux ordres grecs d’architecture, qui sont : le dorique, Yionique, le corinthien , en y ajoutant quelques mots sur les chapiteaux de piliers et d’antes. — Le chapiteau dorique grec comprend deux membres caractéristiques, mais assez simples de formes, malgré les modifications qu’ils ont pu éprouver ; ce sont X échine et Y abaque (V. Architecture grecque, t. III, p. (» !) !), fig. 1, ordre dorique grec du Parthénon). L’échiné est une courbe convexe, très saillante à l’origine, mais de moins en moins saillante à mesure que l’on arrive à la belle époque de l’art, et l’abaque, dans le chapiteau dorique grec comme dans certains chapiteaux égyptiens , est un dé aplati recouvrant l’échiné et supportant l’architrave. Souvent même, au-dessus de ce dé beaucoup plus saillant que la partie supérieure du fût de la colonne, se trouve un second dé de fort peu de hauteur, rendu presque invisible par la saillie du premier et qui reçoit directement la portée de l’architrave. Au bas de l’échiné et pour la relier à la colonne, à la partie supérieure du fût de laquelle ils sont parfois reproduits, sont les armilles ou annelets-, sorte de petits anneaux alternativement en relief ou en creux. — Pour les chapiteaux de piliers ou d’antes, ils offrent, dans l’ordre dorique grec, une extrême variété, selon qu’ils font partie de la construction ou qu’ils jouent un rôle purement décoratif et suivant aussi les époques auxquelles ils appartiennent et les influences étrangères auxquelles lut soumis l’art grec. C’est ainsi que, richement ornés et très mouvementés au grand temple de Selinonte (Sicile) et au temple de Némésis, à Rhamnus (Attique), ils deviennent moins saillants et composés de tablettes et de moulures superposées aux portiques de Délos et aux propylées d’Athènes. — Le chapiteau ionique, qu’il soit grec ou romain et même qu’il appartienne à la Renaissance ou à l’architecture contemporaine, est surtout caractérisé par ses volutes courbes s’enroulant en spirales autour d’un petit disque rond appelé œil et se rejoignant horizontalement ou suivant des inflexions diverses, concaves ou convexes, au-dessous d’un abaque de peu de hauteur et consistant quelquelois en une simple moulure, un quart de rond décoré d’oves. Souvent les volutes ne décorent que la face principale et la face postérieure du chapiteau ; alors leurs courbes sont rejointes, l’une à l’autre, sur les faces latérales par deux rouleaux infléchis au milieu et appelés coussinets, comme au chapiteau du temple de la Victoire Aptère, à Athènes, et du temple d’Apollon Didyméen, à Milet ; mais, parfois aussi, le chapiteau de la colonne d’angle a ses volutes contigués réunies sous un angle de 45° et formant une saillie accentuée, comme dans le beau chapiteau d’angle de l’Erechthcion, à (Athènes ; enfin, les quatre faces du chapiteau offrent quelquefois une disposition particulière dans laquelle les huit volutes se rejoignent sur les angles, ce qui donne une grande fermeté de support au chapiteau, et dont on peut considérer comme type le chapiteau du temple d’Apollon à Bassœ, près Phygalie (Péloponèse). Au-dessous des volutes du chapiteau ionique est un quart de rond, souvent décoré d’oves, qui surmonte l’astragale ornée de perles de la colonne ; mais, parfois aussi, comme à l’Erechtheion, le chapiteau offre en outre un gorgerin et une seconde astragale. — Les chapiteaux d’antes ou de piliers présentent, dans l’ordre ionique grec, de grandes variétés ; les uns consistent en moulures convexes, séparées par des baguettes, comme au temple de la Victoire Aptère ; mais d’autres, comme ceux des chapiteaux d’antes de l’Erechtheion (fig. 3), rappellent et imitent, sur une moindre hauteur, certaines données du chapiteau de la colonne, telles que le gorgerin décoré de palmettes entre deux astragales, et d’autres enfin, comme au temple de Minerve, à Priène, ou au temple d’Apollon Didyméen, à Milet (Asie Mineure), offrent une sorte de cadre ornementé à l’intérieur par des palmettes ou des