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Page:Lamirault - La Grande encyclopédie, inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts, tome 19.djvu/470

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GBOS-GUILLAUME — GROSLAY

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Ce furent, comme on l’a dit, de vaillants farceurs et des bouffons homériques, qui durant près d’un demi-siècle amusèrent tout Paris et à qui l’on peut croire que Molière lui-même dut quelque chose. Leur projet bien arrêté et le tablier de mitron sans peine abandonne, ils s’en vont louer à bas prix un petit jeu de paume sis dans les environs de la porte Saint-Jacques, aménagent tant bien que mal ce local improvisé, fabriquent des semblants de décors avec quelques voiles de bateau grossièrement peintes, fixent le prix de leurs places à deux sols six deniers et ouvrent enfin leur théâtre, où ils donnaient chaque jour deux représentations, la première, pour les écoliers, à une heure aprèsmidi, la seconde, le soir, pour le grand public. Leurs pasquinades, leurs lazzis, leurs quolibets, leurs grivoiseries réussirent si bien, ils y déployaient une telle verve, une telle ardeur, un tel sentiment de la bouffonnerie la plus grotesque, leur grosse gaieté était si naturelle et si communicative, que les spectateurs accoururent en foule et que leur succès fut prodigieux. C’est à ce point qu’au bout de quelques années ils durent quitter leur baraque de la porte Saint-Jacques pour aller s’installer bourgeoisement à l’Hôtel de Bourgogne, où la vogue les suivit, à cet Hôtel de Bourgogne ou les confrères de la Passion les avaient précédés et où leurs successeurs devaient être les vrais fondateurs de notre théâtre régulier. Là, toutefois, sans abandonner la farce, qui fut leur gloire et qu’ils ne cessèrent jamais de pratiquer, ils se livrèrent aussi à l’interprétation de la comédie. Mais, pour montrer sans doute qu’ils tenaient à honneur de continuer leurs traditions, s’ils prirent, pour jouer la comédie proprement dite, les nouveaux surnoms de Lafleur, Fléchette et Belleville, ils conservèrent, pour la parade et pour la farce, les anciens sobriquets sous lesquels ils s’étaient fait connaître.

Gros-Guillaume semble avoir été le chef de ce trio de farceurs qui pendant tant d’années fit la joie du populaire parisien, toujours entêté de spectacle et de jeux scéniques. Et, cependant, le pauvre diable n’était guère servi ni par son physique ni par sa santé. Gros comme un muid et d’une corpulence phénoménale, à ce point que les loustics prétendaient qu’il marchait longtemps après son ventre, il lui fallait, comme plus tard Montlleury, se cercler le corps pour ne point éclater. Vêtu d’une sorte de robe ou de sac informe, il était obligé d’avoir deux ceintures, l’une sous le bras, l’autre, non à la taille, mais au milieu des cuisses, son ventre débordant par-dessus. Dans cet accoutrement, on ne voyait guère ses jambes, dont le bas seulement paraissait, couvert d’un court pantalon, les pieds étant chaussés de souliers à boulfettes. Le costume était complété d’une façon grotesque par une sorte de calot in ou de petit bonnet minuscule fixé tout à fait sur le coté gauche de la tête, que garnissait une large coiffure blanche. A l’encontre de ses deux compagnons, il ne portait point de masque, mais enfarinait abondamment sa large face, au point que, par un simple mouvement des lèvres ou des sourcils, il avait la faculté de couvrir de farine son interlocuteur, et ce à la grande joie du spectateur. On raconte qu’à cette grosseur anormale, qui était une véritable infirmité, venait se joindre, pour Gros-Guillaume, les souffrances d’une maladie cruelle, la pierre, et que les douleurs atroces qu’il en ressentait en scène lui faisaient faire des contorsions et des grimaces qui excitaient le fou rire des spectateurs, ignorants de leur cause. Tout cela ne l’empêchait pas d’être un maître ivrogne et de se saouler en basse compagnie, au dire de Sauvai, ne fréquentant que les savetiers et leurs pareils, et n’étant jamais si excellent devant le public que lorsqu’il avait la panse pleine, et Dieu sait s’il fallait de quoi la remplir ! Selon Sauvai encore, il « n’aima jamais qu’en bas lieu et se maria, en vieux pécheur, sur la fin de ses jours, à une fille assez belle et déjà âgée ». Des trois compagnons, Gros-Guillaume était le moins lettré, bien qu’on ait publié, en 1619, un certain Advis de Gros-Guillaume sur les affaires de ce temps. Quelquesuns ont cru qu’il était l’auteur de cette pièce satirique, mais le fait est absolument rontrouvé, en dépit du titre de cette publication. Le langage de Gros-Guillaume était d’ailleurs non seulement cynique, mais absolument grossier. H n’empêche que ce fut un farceur de génie, si tant est que le mot puisse s’appliquer à la chose, et qu’il était, ainsi que ses deux amis, doué d’une puissance comique irrésistible. Et le talentde ces trois hommes s’alliait si bien que leur ensemble produisait un effet prodigieux, que ce fût en scène même et dans l’intérieur de l’Hôtel, lorsqu’ils jouaient leurs comédies grasses, ou à l’extérieur, lorsqu’ils faisaient la parade et que, se laissant aller à leurs inspirations, ils régalaient leur auditoire de scènes burlesques et grossières, où leur langage haut en couleur et agrémenté d’expressions salées, de lazzis équivoques et de mots moins équivoques, excitait les rires de la foule. Ce qui est certain, c’est qu’après trois siècles leurs noms sont encore laineux, qu’ils appartiennent à l’histoire de notre théâtre, et que leur souvenir vivra tant que cet art du théâtre aura chez nous des admirateurs et des fervents.

GR0SHE1M (Georg-Chrisloph), musicien allemand, fils d’un musicien de la chapelle du landgrave de liesse, né à Cassel en 1704 ; on ne connaît pas la date de sa moit. Cet artiste travailla pendant une vie très longue avec un grand courage sans jamais pouvoir améliorer une situation très précaire. Dès l’âge de dix ans, il copiait de la musique pour aider sa famille qui était très misérable ; après avoir occupé diverses petites places à Cassel, il écrivit deux opéras : Titania et Das heilige Kleehlatt, qui n’ont été publiés qu’en extraits ; malgré leur mérite, ces opéras ne le tirèrent pas de la pauvreté ; en 1818, il fut nommé docteur en philosophie et c’est de ce temps que datent ses meilleures productions ; outre ses œuvres musicales très nombreuses, Grosheim s’est fait connaître comme écrivain ; il a composé des traités d’harmonie, des fragments estimables sur l’histoire de la musique ; sa dernière production est Versurh einer aestetischen Darstellung mehrer Werke dramatischer Tonmeister altérer und neuerer Zeit. GROSIER (Jean-Baptiste-Gabriel-Alexandre), jésuite et historien français, né à Saint-Omer le 17 mars 1743, mort à Paris le 8 déc. 1 823. Après des essais de critique littéraire, il travailla pendant quarante ans à V Histoire générale de la Chine compilée à Pékin par le père Mailla (1777-1784, 12 vol. in-4). Il écrivit, en 1786, une Description générale de la Chine, d’après les travaux des missionnaires.

GROS JEAN (Jean-Bomary), organiste français, né à Bochesson (Vosges) le 12 janv. 1815. Nommé en 1839 organiste de la cathédrale de Saint-Dié, il a publié une collection très intéressante intitulée Album d’un organiste catholique, ou Recueil de morceaux d’orgue pour l’offertoire, l’élévation, la communion, lasortie des offices. En outre, il a publié un Journal îles organistes, ou Choix de musique pour toutes les parties du service divin, qui a rendu des services importants aux organistes des petites localités. En 1861, Grosjean réunit une édition complète des Noëls de la Lorraine avec des mélodies populaires. Quelques années auparavant, en 1857, il avait découvert un manuscrit précieux dans la bibliothèque de Saint-Dié, qui contenait une copie complète et unique de {’Introduction a la musique plaine cl mesurée de Jean de Garlande avec d’autres ouvrages curieux.

GROSJEAN (Ernest), organiste français, neveu du précédent, né à Vagney (Vosges) le 18 déc. 1844. Il reçut de son oncle les premières notions musicales et devint organiste de la cathédrale de Verdun-sur-Meuse qu’il n’a plus quitté. Il a publié des ouvrages importants pour l’orgue : Trois cents Versets composés pour l’orgue dans lestons les plus usités ; une Théorie et pratique de l’accompa gnement du plain-chant, méthode excellente. GROSLAY. Corn, du dép. de Seine-et-Oise, arr. de Pontoise, cant. de Montmorency ; 1,233 hab. Dans l’église, vitraux du xvi e siècle, attribués à Jean Cousin (V. ce nom).