Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/242

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l’entreprise est souvent, pour la plupart d’entre eux, tout à fait fictive. Il y a un actionnaire ou un petit nombre d’actionnaires qui détiennent un grand nombre d’actions, soit que ces actions représentent leur apport dans la société, soit qu’elles aient été pavées avec de l’argent ; et ce sont ces gros actionnaires qui sont les maîtres effectifs. On peut même voir un petit groupe d’administrateurs, de hauts employés conduire les affaires de la société a leur gré. Les moyens de contrôle dont disposent la généralité des actionnaires se réduisent à peu près à rien : ce n’est guère que dans les circonstances critiques qu’ils se trouvent en mesure, éclairés par de certains faits qui ne peuvent pas être cachés, d’intervenir et de faire prévaloir leur volonté.

129. Des sociétés par actions en particulier. Raisons de leur multiplication. — Les sociétés par actions se sont développées considérablement dans notre époque : les chiffres que nous donnerons tantôt le feront voir. Les causes de ce développement sont multiples.

1° Tout d’abord il est clair que cette forme d’entreprise est celle qui convient le mieux quand il s’agit de monter de très grosses affaires. Il y a des entreprises — chemins de fer, entreprises de navigation, banques, etc. — qui exigent comme mise de fonds des dizaines, voire des centaines de millions : il serait bien difficile de trouver des particuliers qui, même en s’associant à quelques-uns, pussent avancer de pareilles sommes.

2° La multiplication des sociétés par actions, d’autre part, s’explique par les avantages que les capitalistes trouvent à placer leur argent dans des sociétés de cette sorte. Le minimum de la souscription étant de 100 francs ou même de 25 francs, les plus petites bourses peuvent s’intéresser aux affaires même les plus colossales. Ceux qui possèdent davantage, étant maîtres de régler leur participation comme il leur plaît, peuvent devenir actionnaires de plusieurs sociétés, divisant ainsi, et par conséquent compensant les risques que les entreprises comportent toujours. Le capitaliste, maintenant, vient-il à se trouver dans la nécessité de réaliser ? la facilité avec laquelle les titres des sociétés se négocient lui permettra de se débarrasser de ses actions — à un prix sans doute plus ou moins élevé — quand il voudra. Et il faut mentionner encore, parmi les raisons qui attirent les capitalistes vers les actions des sociétés, la possibilité qu’ils trouvent de se livrer, sur ces actions, à toutes sortes de spéculations.

Nous avons dit pourquoi les sociétés par actions se sont multipliées. Nous n’avons pas voulu dire que cette forme d’entreprise ne présentât par rapport aux autres que des avantages, à tous les points de vue. On a renoncé, d’une manière générale, à soutenir que la société par actions traitait ses employés et ses ouvriers plus mal que ne font ces chefs d’entreprises auxquels on réserve communément le nom de patrons ; on reconnaît du moins qu’il est impossible de porter un jugement d’ensemble sur ce point.