Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/249

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui a trait à la détermination des conditions de l’emploiement. On voit les ouvriers discuter avec leur employeur la quotité de leur salaire, la durée de la journée de travail, etc. ; mais ils ne s’immiscent nullement dans les questions techniques ou commerciales, lesquelles sont réservées au seul patron.

Nous ne trouverons quelque chose qui ressemble à l’entreprise coopérative que là où existe ce que les Anglais appellent le copartnership. Cette institution procède, à l’ordinaire, de la participation aux bénéfices simple. Dans les entreprises où les employés participent aux bénéfices, ce supplément de salaire est versé le plus souvent, au moins en partie, dans une caisse d’épargne ou de retraite. Il suffit — si l’entreprise est montée par actions — d’employer les sommes ainsi épargnées à acheter des actions de cette entreprise pour que le copartnership soit établi. Le copartnership d’ailleurs est en général une transition vers la coopération de production proprement dite. Quand dans un établissement où les employés sont intéressés, au lieu de donner en argent à ces employés la part qui leur revient dans les bénéfices on leur donne cette part sous la forme d’actions de l’établissement, c’est le plus souvent qu’on veut progressivement leur transférer toute la propriété de celui-ci. Les choses se sont passées ainsi au Familistère de Guise, à l’imprimerie van Marken de Delft, etc.[1].

132. Peu d’importance de cette sorte d’entreprise. — Arrivons aux entreprises vraiment coopératives : ce sont les coopératives de production, ou du moins — car nous avons vu que cette dernière expression était employée parfois dans un sens trop large — ces coopératives de production dans lesquelles les bénéfices, comme aussi la propriété de l’entreprise, appartiennent aux travailleurs qui produisent.

  1. Les coopératives de consommation qui fabriquent des produits sont-elles logiquement obligées d’accorder le copartnership aux ouvriers qu’elles emploient pour cette fabrication ? La question est débattue (voir Gide, Économie sociale, chap. 4, I, § 1, pp. 411-412). Pour y voir clair dans cette question, il faut se rappeler ce que nous avons dit plus haut, à savoir que lorsqu’une coopérative de consommation fabrique des produits, ce n’est pas là une entreprise. La Wholesale de Manchester se refuse à instituer le copartnership en faveur de ses ouvriers. Elle nous paraît avoir raison. En fabriquant, en effet, les produits que consomment ses membres, elle réalise pour ceux-ci, non pas des bénéfices, mais des économies. Et toute la constitution de la coopérative de consommation sera détruite si la propriété du capital que le fonctionnement de la société exige vient à passer, même pour partie, de ceux qui sont dans la société en qualité de consommateurs à ceux que ces consommateurs sont obligés d’employer. De la même façon, quand un particulier veut faire construire une maison à son usage — le cas serait différent s’il s’agissait d’une maison de rapport — et que, au lieu de s’adresser à un entrepreneur, il achète lui-même les matériaux et paie lui-même les ouvriers, il cherche à réaliser une économie, non un bénéfice : et personne ne demandera sans doute qu’il donne aux ouvriers qu’il emploie une part de la propriété de sa maison.