Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/26

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Les phénomènes économiques, avons-nous vu, sont conditionnés par les institutions juridiques. Les institutions juridiques impriment une certaine direction et font produire de certains résultats à l’activité économique des hommes. Elles leur permettent d’employer certaines méthodes, d’accomplir certains actes pour assurer par l’acquisition des biens échangeables la satisfaction de leurs besoins ; elles leur interdisent les autres méthodes, les autres actes. Mais il est immédiatement manifeste que ce n’est pas seulement aux institutions juridiques que les faits économiques sont subordonnés. Ils sont subordonnés encore aux institutions politiques, aux croyances et aux mœurs, etc.

Les faits économiques dépendent des institutions politiques. N’est-il pas évident que l’économie de l’État sera déterminée avant tout par l’organisation de celui-ci ? Pour ce qui est des économies particulières, elles prospéreront plus ou moins selon que le fonctionnement de la machine politique sera plus ou moins régulier, selon que l’État assurera l’ordre plus ou moins bien. Et sans parler des interventions possibles de l’État dans ces économies, la direction générale des activités économiques particulières, la confiance, la hardiesse que d’une manière générale les individus montreront dans leurs entreprises — et qui sont choses d’une très grande importance — dépendront pour beaucoup du ton, si l’on peut ainsi dire, de la vie politique de la nation à laquelle ils appartiennent.

Les faits économiques dépendent des croyances, des mœurs, choses éminemment sociales, et des goûts, qui sont sociaux encore dans une très grande mesure. Les différences si frappantes que l’on constate entre l’économie des sociétés européennes et celle des sociétés de l’Orient et de l’Extrême-Orient, n’est-il pas apparent qu’il y a lieu de les expliquer en grande partie par les différences dans les religions, dans l’organisation de la famille, dans les besoins et les habitudes que l’on trouve chez les unes et chez les autres ? Pour ne parler que des mœurs et des goûts, qui ne sait que l’ardeur au travail, l’esprit de prévoyance, le souci du confort, le respect de soi-même, toutes ces choses, plus ou moins développées non seulement d’un pays à l’autre, mais d’une province et parfois d’un canton à un autre, contribuent à donner à l’économie des caractères extrêmement variés ? C’est là une vérité reconnue de tous aujourd’hui, et il faut être reconnaissant à l’école historique de l’avoir mise en pleine lumière.

Mais les conditions économiques, à leur tour, influent, en même temps que sur les institutions juridiques, sur toutes les autres manifestations de la vie sociale. Et c’est encore là une vérité trop bien établie pour qu’il soit besoin d’y insister longuement. Ce sont les questions économiques qui de plus en plus provoquent les révolutions et les changements politiques : car les classes sociales prennent de mieux en mieux conscience de leurs intérêts. Les mêmes questions jouent un rôle chaque jour plus grand dans