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qu’a coûté, dans chaque espèce de biens, celle des unités dont la production a été la plus coûteuse — parmi les unités qu’il a été socialement avantageux de produire —, mais par le travail moyen qui a été incorporé dans chaque espèce de biens. Or on ne voit pas pourquoi il devrait en être ainsi, ni non plus comment il pourrait en être ainsi. Et cette conception est démentie par le fait bien connu, et si général dans l’économie, de la rente.

c) À la vérité, Marx n’a pas ignoré le fait de la rente ; il n’a pas ignoré que les prix s’écartaient, perpétuellement, de la valeur telle qu’il la définit. Mieux que cela : il nous a donné une théorie de la rente[1] ; il distingue le prix et la valeur. Mais il ne peut les distinguer qu’en se contredisant. Pour expliquer que la valeur ne se réalise pas toujours exactement dans les prix, il est obligé d’introduire un facteur nouveau, la concurrence ; et il est impossible de voir comment l’action de ce facteur s’accorderait avec les principes que Marx a tout d’abord posés.

6° Par l’introduction du facteur de la concurrence, la théorie de Marx sur la valeur, qui jusque-là apparaissait comme une théorie tout à fait systématique, devient une théorie syncrétique. D’autres théories se présentent tout de suite à nous avec ce caractère. Ainsi Effertz donne une formule de la valeur où entrent tous les facteurs que l’observation nous montre influant sur elle : le coût en travail, le coût en terre, la quantité offerte, la quantité demandée, etc.[2]. Une théorie pareille appelle immédiatement cette critique, qu’elle ne nous fait pas comprendre comment chacun de ces facteurs si divers qu’elle rassemble influe sur la valeur, et en quel mode, dans quelle proportion, ces influences multiples se combinent.

283. Critique générale des théories objectives. — Jetons un coup d’œil d’ensemble sur les théories objectives de la valeur que nous venons de passer en revue. Ces théories contiennent toutes, en un sens, une part de vérité. Chacune d’elles se vérifie dans certains cas. Toutes, ce pendant, elles laissent à désirer ; et leur défaut commun, c’est qu’elles ne poussent pas assez loin l’analyse des faits, qu’elles ne remontent pas jusqu’aux faits d’ordre psychologique dont on peut dire qu’ils donnent naissance à la valeur, qu’elles ne développent pas tout cet enchaînement de causes et d’effets, tout ce processus qui se suspend à ces faits d’ordre psychologique et par lequel la valeur se détermine. Et c’est de ce défaut que proviennent les autres défauts que nous avons signalés dans les théories objectives : c’est pour ne pas avoir procédé à une analyse assez rigoureuse que les auteurs ou les partisans de ces théories objectives ont

  1. Dans le livre III de son Capital, 6e partie (trad. fr., Paris, Giard et Brière, t. II, 1902).
  2. Voir les Antagonismes économiques, 1re partie, chap. 3, ii.