Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/591

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tout entier — qui apparaît d’abord, sans que le taux de cet intérêt dépende le moins du monde d’aucune condition d’espèce ; et il se trouve ensuite que cet intérêt est au capitaliste, selon la situation particulière de celui-ci, un revenu gratuit pour une partie plus ou moins grande.

Introduisons enfin le troisième des caractères que nous énumérions tout à l’heure. Par là encore la portion gratuite de l’intérêt sera exclue de la catégorie de la rente. Car cette portion gratuite de l’intérêt, n’étant gratuite, ainsi qu’on vient de voir, que pour des raisons subjectives, ne se rat tache pas à la possession d’un bien, à quelque chose que l’on pourrait céder. Et en même temps seront exclus de la catégorie de la rente la portion gratuite du salaire et le profit. La portion gratuite du salaire, de même que la portion gratuite de l’intérêt, ne dérive pas d’un bien qui pourrait être cédé — on ne peut d’ailleurs pas même vendre, dans notre régime social, l’être humain qui par son travail obtient un salaire —. Quant au profit, lui non plus il n’est pas le revenu d’un bien échangeable : cela résulte de ce qu’il est, par définition, un revenu qui se surajoute aux autres. Lorsqu’un individu, par exemple, achète un fonds de commerce, il ne paie pas le profit qu’il s’assurera en l’exploitant, puisque précisément il n’aura un profit qu’autant qu’il lui restera quelque chose après qu’il aura prélevé la rémunération de ses avances.

Tel que nous l’avons défini, le concept de la rente ne chevauche point sur les concepts de l’intérêt et du salaire. Mais ce n’est pas à dire que la rente puisse apparaître toujours séparément de ces deux autres revenus. Bien au contraire, la rente se formera le plus souvent en même temps qu’eux ; et cela tient à ce fait, qui nous est bien familier, qu’il n’y a presque pas de production qui n’exige de la main-d’œuvre et du capital. Il faut de la main-d’œuvre et du capital, par exemple, pour cultiver la terre ; sans cette double dépense, la rente agricole ne pourrait pas prendre naissance : et cette rente variera avec les quantités inégales de main-d’œuvre et de capital qu’on dépensera pour la culture, comme aussi avec les proportions diverses selon lesquelles ces deux facteurs seront em ployés.

337. Différentes sortes de rentes. — Ces biens dont la possession nous assurera une rente peuvent être de toutes les sortes. La rente peut être attachée à la terre, soit d’ailleurs qu’on cultive celle-ci, soit qu’on y construise des maisons d’habitation, soit qu’on en extraie telle ou telle matière. Elle peut être attachée à une usine, non plus en tant que cette usine occupe un emplacement particulier — dans ce cas, c’est devant une rente foncière que l’on se trouverait —, mais en tant qu’elle renferme un certain outillage : le propriétaire d’une usine jouira d’une rente s’il a pu, en acquérant un outillage perfectionné, se donner un avantage, même temporaire, sur ses concurrents. Elle peut être attachée à un fonds de