Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/196

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avec quelques lettres bizarres, tel que le g qui, composé de trois traits droits, rappelle la même lettre dans l’alphabet anglo-saxon. M. Delisle attribue à cette école quelques-uns des plus beaux monuments du IXe siècle ; nous n’en citerons que quatre : la Bible du comte Vivien, à Paris ; celle d’Alcuin, au Musée Britannique ; le Sacramentaire d’Autun et l’Évangéliaire de l’empereur Lothaire.

La Bible offerte à Charles le Chauve par le comte Vivien[1] est un des plus beaux spécimens de l’art carolingien. Les lettres ornées, dont beaucoup sont sur fond de couleur, sont tout à fait anglo-saxonnes. Par contre, l’inspiration antique se fait jour dans le reste de l’ornementation ; aux canons des évangiles, on remarque des animaux traités assez librement, mais copiés sur d’anciens modèles, et des mufles de lion ; des chapiteaux des colonnes, les uns sont corinthiens, les autres formés d’entrelacs de couleur….

De cette Bible on peut rapprocher la Bible de Glanfeuil (aujourd’hui à la Bibliothèque nationale), donnée à cette abbaye par le comte Roricon, gendre de Charlemagne, celle de Zürich, et surtout celle d’Alcuin, conservée au Musée Britannique. L’attribution à Alcuin de la confection de ce dernier volume est fondée sur une pièce de vers dans laquelle ce célèbre écrivain se nomme et nomme Charlemagne. Les peintures et les ornements rappellent tout à fait la Bible de Charles le Chauve ; même imitation de l’art antique, avec un certain mélange d’ornements anglo-saxons.

[Illustration : L’empereur Lothaire.]

L’Évangéliaire de Lothaire, exécuté par Sigilaus aux frais de ce prince, et offert par ce dernier à Saint-Martin de Tours, est encore un magnifique exemple de ce que savaient faire les calligraphes du IXe siècle. Même mélange des deux arts, mais ici

  1. [« Le comte Vivien fut un grand personnage. Quoique laïque, il reçut, en 845, de Charles le Chauve, l’investiture de l’abbaye de Saint-Martin et de celle de Marmoutier. C’est lui qui, en 846, réduisit à deux cents le nombre des chanoines de Saint-Martin. Détesté en qualité de laïque, et peut-être à cause de l’énergie (ou de la dureté) dont il paraît avoir fait preuve dans son administration, il fut tué, aux applaudissements de ses moines, en 851, au cours d’une campagne contre les Bretons. » (S. Berger, p. 217.)]