Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/266

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licence. Il fixa à cinq années le cours de médecine et de chirurgie. Il fit étudier les propriétés des sources chaudes de Pouzzoles. Il donnait lui-même des prescriptions à ses amis et inventait des recettes. On lui amenait d’Asie et d’Afrique les animaux les plus rares et il en observait les mœurs ; le livre De arte venandi cum avibus, qui lui est attribué, est un traité sur l’anatomie et l’éducation des oiseaux de chasse. Les simples contaient des choses terribles sur ses expériences. Il éventrait, disait-on, des hommes pour étudier la digestion ; il élevait des enfants dans l’isolement, pour voir quelle langue ils inventeraient, l’hébreu, le grec, le latin, l’arabe, ou l’idiome de leurs propres parents, dit Fra Salimbene, dont toutes ces nouveautés bouleversent l’esprit ; il faisait sonder par ses plongeurs les gouffres du détroit de Messine ; il se préoccupait de la distance qui sépare la terre des astres. Les moines se scandalisèrent de cette curiosité universelle ; ils y voyaient la marque de l’orgueil et de l’impiété ; Salimbene la qualifie, avec un ineffable dédain, de superstition, de perversité maudite, de présomption scélérate et de folie. Le moyen âge n’aimait point que l’on scrutât de trop près les profondeurs de l’œuvre divine, que l’on surprît le jeu de la vie humaine ou celui de la machine céleste. Les sciences de la nature lui semblaient suspectes de maléfice, de sorcellerie. L’Italie, engagée par les Hohenstaufen dans les voies de l’observation expérimentale, devait être longtemps encore la seule province de la chrétienté où l’homme contemplât, sans inquiétude, les phénomènes et les lois du monde visible.

E. GEBHART, L’Italie mystique, Paris, Hachette, 1893, in-16, 2e éd. Passim.