Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/272

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cation est d’ailleurs une des causes qui ont le plus contribué à fonder sa réputation. Entre le concile de Clermont et son départ pour l’Orient, il trouva moyen de parcourir des distances énormes, gagnant partout des partisans à la cause du pape. Là où il ne pouvait pas aller lui-même, il envoyait sans doute des missionnaires, comme Gauthier sans Avoir, Reinold de Breis, Gauthier de Breteuil et Gottschalk. Il semble qu’il ait commencé sa carrière oratoire en Berry, province limitrophe de l’Auvergne et de la Marche, où Urbain se trouvait pendant l’hiver de 1095. Il passa de là en Lorraine et dans la région rhénane, mais son itinéraire est inconnu.

Après un séjour d’une semaine à Cologne, il traversa paisiblement avec une armée immense et confuse de Français, de Souabes, de Bavarois et de Lorrains, l’Allemagne du sud et la Hongrie. La traversée de la Bulgarie fut, au contraire, difficile et sanglante. Les bandes de Pierre étaient décimées quand elles arrivèrent à Constantinople, trois mois et dix jours après leur départ de Cologne. Elles y trouvèrent un nombre assez considérable de pèlerins venus de Lombardie, et Gauthier sans Avoir, qui s’était séparé du gros des forces de l’Hermite sur les bords du Rhin, pour prendre les devants.

L’expédition se termina au mois d’octobre par un désastre lamentable près de Civitot ou Hersek, en Asie Mineure. Parmi ceux qui échappèrent aux coups des Turcs, on cite, outre Pierre, le comte Henri de Schwarzenberg, Frédéric de Zimmern, Rodolphe de Brandis, qui, blessés dans le combat, guérirent de leurs blessures et se joignirent plus tard à l’armée de Godefroi de Bouillon. Mais le plus grand nombre périt, entre autres Gauthier sans Avoir, percé de sept flèches, le comte palatin Hugues de Tubingue, le duc Walther de Teck, le comte Rodolphe de Sarverden. On voit que les compagnons de Pierre n’avaient point été, comme on le dit souvent sur la foi de Guibert de Nogent, exclusivement recrutés dans la lie des populations occidentales.

En se répandant en Europe, la nouvelle du désastre porta, sans doute, une grave atteinte à la considération dont le nom de Pierre l’Hermite était entouré ; on dut tout d’abord attribuer la responsabilité du sang versé, comme on le fit pour Volkmar,