Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/52

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Les puissances qui existent sont ordonnées par Dieu, en sorte que celui qui fait de l’opposition aux puissances résiste à l’ordre de Dieu. » Quelques années après, Pierre, ou celui qui écrivit en son nom l’épître connue sous le nom de Prima Petri, s’exprime d’une façon presque identique. Clément est également un sujet on ne peut plus dévoué de l’empire romain. Enfin, un des traits de saint Luc, c’est son respect pour l’autorité impériale et les précautions qu’il prend pour ne pas la blesser.

Certes, il y avait des chrétiens exaltés qui partageaient entièrement les colères juives et ne rêvaient que la destruction de la ville idolâtre, identifiée par eux avec Babylone. Tels étaient les auteurs d’apocalypses et les auteurs d’écrits sibyllins. Pour eux, Christ et César étaient deux termes inconciliables. Mais les fidèles des grandes Églises avaient de tout autres idées. En 70, l’Église de Jérusalem, avec un sentiment plus chrétien que patriotique, abandonna la ville révolutionnaire et alla chercher la paix au delà du Jourdain. Saint Justin, dans ses Apologies, ne combat jamais le principe de l’empire ; il veut que l’empire examine la doctrine chrétienne, l’approuve, la contresigne en quelque sorte et condamne ceux qui la calomnient. On vit le premier docteur du temps de Marc-Aurèle, Méliton, évêque de Sardes, faire des offres de service bien plus caractérisées encore, et présenter le christianisme comme la base d’un empire héréditaire et de droit divin…. Tous les apologistes flattent l’idée favorite des empereurs, celle de l’hérédité en ligne directe, et les assurent que l’effet des prières chrétiennes sera que leur fils règne après eux….

La haine entre le christianisme et l’empire était la haine de gens qui doivent s’aimer un jour. Sous les Sévères, le langage de l’Église reste ce qu’il fut sous les Antonins, plaintif et tendre. Les apologistes affichent une espèce de légitimisme, la prétention que l’Église a toujours salué tout d’abord l’empereur. Le principe de saint Paul portait ses fruits : « Toute puissance vient de Dieu ; celui qui tient l’épée la tient de Dieu pour le bien. »

Cette attitude correcte à l’égard du pouvoir tenait à des nécessités extérieures tout autant qu’aux principes mêmes que l’Église avait reçus de ses fondateurs. L’Église était déjà une grande association ; elle était essentiellement conservatrice ; elle avait besoin