Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

grande joie des convives, qui rient à gorge déployée ; Salone et Sagittaire, qui vont à la guerre avec casque et cuirasse et font pendant la paix le métier de coupeurs de bourses, s’attaquant même aux hommes d’Église, comme ce jour où ils envahissent à la tête de leurs bandes la maison d’un évêque occupé à célébrer une fête, maltraitent l’hôte, tuent les convives et s’enfuient chargés de butin ; brigands incorrigibles, déposés par un concile, mais rétablis, enfermés par Gontran dans un monastère, puis libérés, — tant il y avait d’indulgence pour des crimes d’évêques, — jouant la comédie de la pénitence, répandant les aumônes, jeûnant, psalmodiant nuit et jour, puis retournant à leur vie habituelle, c’est-à-dire buvant la nuit pendant les chants de matines, quittant la table aux premiers rayons de l’aurore, et se levant vers la troisième heure pour se baigner et se remettre à table où ils demeuraient jusqu’au soir ; Badegisel du Mans, qui « n’a pas laissé passer un jour, ni même une heure, sans commettre quelque brigandage » ; Pappole de Langres, dont Grégoire se refuse à dire les iniquités, prétérition qui permet de supposer des monstruosités, car le bon évêque n’est pas pudibond. A côté de ces princes de l’Église séculière, on pourrait nommer tel abbé assassin et adultère, tel ermite qui, ayant reçu de quelques fidèles en témoignage de vénération une provision de vin, se mit à boire et à courir les champs, armé de pierres et de bâtons, si bien qu’il fallut l’enchaîner dans sa cellule ; enfin cette religieuse du couvent de Sainte-Radegonde, Chrodield, une princesse mérovingienne qui s’insurge contre son abbesse Leudovère. Grégoire a beau lui rappeler que les canons frappent d’excommunication les religieuses qui désertent le cloître, elle se rend auprès du roi Gontran, son oncle, et elle obtient de lui qu’une commission d’évêques examinera ses griefs. De retour à Poitiers, elle trouve la maison en grand désordre ; plusieurs de ses compagnes se sont mariées. Craignant alors le jugement épiscopal, elle arme une bande de vauriens. Les évêques arrivent et ils excommunient les mutines, mais celles-ci les assiègent dans une église, d’où ils s’enfuient non sans avoir reçu force mauvais coups. De son côté, Leudovère, qui a été chassée, arme ses serviteurs. Poitiers est en proie à la guerre