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Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/291

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de toute défense du côté de la terre, ils avaient été forcés de se rendre à discrétion au moment où ils allaient être emportés à la baïonnette, et pourtant ils croyaient être prisonniers de guerre et devoir être traités comme tels ; ils ignoraient le décret qui les mettait hors la loi, et ils s’attendaient à être délivrés par l’insurrection vendéenne. Il y en eut qui refusèrent les avis et les facilités qu’on leur offrait pour s’échapper, soit par un faux point d’honneur, soit par de folles espérances, ou peut-être par une injuste défiance de nos conseils[1]… »


Ainsi, il est bien établi, d’une part, que les généraux républicains croyaient pouvoir se dispenser des précautions les plus élémentaires pour empêcher la fuite ou la révolte de leurs prisonniers ; et d’autre part, que ces prisonniers jugeaient inutile et déloyal de profiter des « facilités qu’on leur offrait », et des « avis » qu’on leur donnait, car les troupes d’escorte faisaient mieux que fermer les yeux ; elles invitaient souvent leurs captifs à fuir, et ceux-ci refusaient de s’évader ; on en vit même deux ou trois cents, laissés en arrière, rejoindre isolément et venir bénévolement se faire écrouer dans les prisons d’Auray. Tout cela rentre dans la catégorie des faits étranges qui font de cette affaire de Quiberon, depuis le commencement jusqu’à la fin, un épisode absolument extraordinaire et qui appellent les méditations de quiconque cherche dans l’histoire le mobile des actes et la raison des événements.

  1. Moreau de Jonnès, Aventures de guerre, t. Ier, chap. V, pp. 226, 227.