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Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/35

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reprendre l’attitude superbe de l’intransigeance pour « rétablir le gouvernement qui fut pendant quatorze siècles la gloire de la France et les délices des Français, le seul qui leur convienne, étouffer la manie des nouveautés, opposer une digue insurmontable à tout projet de changement[1] ».

Il ne faudrait pas croire que ce programme fût formulé uniquement pour satisfaire les classes dépossédées ; il était fait aussi pour rallier un bon nombre des plus avisés et des plus retors, c’est-à-dire des plus influents, parmi les gouvernants actuels du pays qui étaient, en réalité, très disposés à s’en accommoder. — « L’ancien régime était parfait ; il n’y avait que les hommes à changer », prononçait un jour Cambacérès, de ce ton sentencieux que son importance lui avait fait prendre. Propos sans conséquence, dira-t-on ; forfanterie d’archichancelier grisé par l’ivresse de la fortune et des honneurs ; — non pas ; le mot ne fait qu’exprimer très exactement la pensée intime du conventionnel, et explique la politique suivie par lui et quelques habiles de son espèce, en faveur des projets du comte de Provence. Il en a laissé échapper d’autres aveux, notamment lorsque, parlant des intrigues menées en divers sens pour le mariage de Madame Royale, il déclarait : « Nous préférâmes qu’elle se mariât à son cousin[2]. »

  1. Voir sa lettre à Mounier, en date du 2 juin 95. — Voir aussi un exposé de principes contenu dans un écrit de sa main datant de son séjour à Blankenbourg et à Mittau (1797-1798) publié par M. Martin Doisy (Michaud, Paris, 1839).
  2. Ce cousin était le duc d’Angoulême. Il est très remarquable que ce mariage était devenu « l’affaire » qui occupait le