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CORNEILLE.

plus, appliqué en conscience à régler de petits intérêts et pacifier des conflits locaux : cela contraste curieusement avec ce haut essor de la pensée dans les tragédies. Enfin Corneille tient avec une scrupuleuse exactitude les comptes de sa paroisse, dont nous le trouvons marguillier en 1652 : il a tout ce qui fait l’homme bien posé et considéré dans son voisinage. Sa dévotion était exacte et solide. Il demeura toujours en fort bons termes avec les pères jésuites qui l’avaient élevé, et nous en avons le témoignage dans les affectueuses dédicaces de quelques exemplaires de ses tragédies.

Au moment où, abandonnant ses charges, il allait avoir plus de loisirs, il résolut de s’appliquer à une œuvre de piété.

Ayant lu les vers latins du pape Alexandre VII, les « rares pensées de la mort » qu’il y trouva semées le « plongèrent dans une réflexion sérieuse qu’il fallait comparaître devant Dieu et lui rendre compte du talent dont il l’avait favorisé. Je considérai ensuite, nous dit-il, que ce n’était pas assez de l’avoir si heureusement réduit à purger notre théâtre des ordures que les premiers siècles y avaient comme incorporées, et des licences que les derniers y avaient souffertes ; qu’il ne me devait pas suffire d’y avoir fait régner en leur place les vertus morales et politiques, et quelques-unes même des chrétiennes, qu’il fallait porter ma reconnaissance plus loin et appliquer toute l’ardeur du génie à quelque nouvel essai de ses forces qui n’eût point d’autre but que le service de ce grand maître et l’utilité du prochain. C’est ce qui m’a fait choisir la traduction de cette sainte morale, qui, par