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HOMMES ET LIVRES

logie, mais identité d’esprit, dans le Traité des passions, et dans la tragédie cornélienne. Jamais, que je sache, on n’a mis en lumière cette identité, et c’est pourquoi je voudrais la rendre évidente par quelques rapprochements de textes. Peut-être apprendra-t-on ainsi à rendre plus de justice à la psychologie de Corneille, lorsque l’on verra ses conceptions qui nous paraissent les plus aventureuses et fantaisistés, affirmées par le philosophe comme d’incontestables vérités.

Tout le monde n’a pas entre les mains, et les philosophes seuls peuvent avoir dans la mémoire le Traité des passions : aussi laisserai-je souvent la parole à Descartes. De brèves indications suffiront pour Corneille.

I

Le principe de la psychologie cornélienne, c’est la force, la toute-puissance de la volonté. Tous les héros de Corneille sont des héros de la volonté :

Je suis maître de moi comme de l’univers :
Je le suis, je veux l’être….,


dit Auguste dans Cinna. Et Pauline, dans Polyeucte :

… sur mes passions ma raison souveraine…

Tous ont la même nature et le même langage. Ouvrons maintenant le Traité des passions nous rencontrons bientôt un titre aussi décisif que suggestif :

Article 40. — Qu’il n’y a point d’âme si faible qu’elle ne puisse, étant bien conduite, acquérir un pouvoir, absolu sur ses passions.