Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/324

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

précision des observations astronomiques, le très grand nombre de celles qu’il faut employer pour que leurs erreurs se compensent ne permet pas de leur appliquer la méthode la plus avantageuse.

Sur l’invitation de l’Académie des Sciences, on fit, au commencement du dernier siècle, dans le port de Brest, des observations des marées pendant six années consécutives. C’est à ces observations, publiées par Lalande, que j’ai comparé, dans le Livre cité, mes formules. La situation de ce port est très favorable à ce genre d’observations. Il communique avec la mer par un vaste canal, au fond duquel on l’a construit. Les irrégularités du mouvement de la mer parviennent ainsi dans le port très affaiblies, à peu près comme les oscillations que le mouvement irrégulier d’un vaisseau produit dans le baromètre sont atténuées par un étranglement fait au tube de cet instrument. D’ailleurs, les marées étant considérables à Brest, les variations accidentelles n’en sont qu’une faible partie. Aussi l’on remarque dans les observations de ces marées, pour peu qu’on les multiplie, une grande régularité, que n’altère point la petite rivière qui vient se perdre dans la rade immense de ce port. Frappé de cette régularité, je proposai au Gouvernement d’ordonner que l’on fit à Brest une nouvelle suite d’observations des marées, et qu’elle fût continuée au moins pendant une période du mouvement des nœuds de l’orbite lunaire. C’est ce que l’on a entrepris. Ces nouvelles observations datent du 1er juin de l’année 1806, et depuis cette époque elles ont été continuées chaque jour, sans interruption. On a considéré celles de l’année 1807 et des quinze années suivantes. Je dois au zèle infatigable de M. Bouvard pour tout ce qui intéresse l’Astronomie les calculs immenses que la comparaison de mon analyse avec les observations a exigés. Il y a employé près de six mille observations. Pour avoir les hauteurs des pleines mers et leur variation, qui près du maximum et du minimum est proportionnelle au carré du temps, on a considéré vers chaque équinoxe et vers chaque solstice trois syzygies consécutives, entre lesquelles l’équinoxe ou le solstice étaient compris ; on a doublé les résultats de la syzygie intermédiaire, pour détruire les effets de la parallaxe lunaire.