Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/340

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Nous remarquerons ici que l’attraction du Soleil et de la Lune ne produit ni dans la mer ni dans l’atmosphère aucun mouvement constant d’orient en occident ; celui que l’on observe dans l’atmosphère entre les tropiques, sous le nom de vents alizés, a donc une autre cause : voici la plus vraisemblable.

Le Soleil, que nous supposons, pour plus de simplicité, dans le plan de l’équateur, y raréfie par sa chaleur les colonnes d’air et les élève au-dessus de leur véritable niveau ; elles doivent donc retomber par leur poids, et se porter vers les pôles dans la partie supérieure de l’atmosphère : mais en même temps il doit survenir dans la partie inférieure un nouvel air frais qui, arrivant des climats situés vers les pôles, remplace celui qui a été raréfié à l’équateur. Il s’établit ainsi deux courants d’air opposés, l’un dans la partie inférieure et l’autre dans la partie supérieure de l’atmosphère ; or la vitesse réelle de l’air, due à la rotation de la Terre, est d’autant moindre qu’il est plus près du pôle ; il doit donc, en s’avançant vers l’équateur, tourner plus lentement que les parties correspondantes de la Terre, et les corps placés à la surface terrestre doivent le frapper avec l’excès de leur vitesse et en éprouver, par sa réaction, une résistance contraire à leur mouvement de rotation. Ainsi, pour l’observateur qui se croit immobile, l’air paraît souffler dans un sens opposé à celui de la rotation de la Terre, c’est-à-dire d’orient en occident : c’est en effet la direction des vents alizés.

Si l’on considère toutes les causes qui troublent l’équilibre de l’atmosphère, sa grande mobilité due à sa fluidité et à son ressort, l’influence du froid et de la chaleur sur son élasticité, l’immense quantité de vapeurs dont elle se charge et se décharge alternativement, enfin les changements que la rotation de la Terre produit dans la vitesse relative de ses molécules par cela seul qu’elles se déplacent dans le sens des méridiens, on ne sera point étonné de la variété de ses mouvements, qu’il sera très difficile d’assujettir à des lois certaines.


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