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sur les probabilités.

sieurs sens, et spécialement sur ceux du toucher et de la vue.

L’influence des traces rappelées par la mémoire, sur les impressions qu’excitent les objets extérieurs, se fait remarquer dans un grand nombre de cas. On voit de loin des lettres, sans pouvoir distinguer le mot qu’elles expriment. Si quelqu’un prononce ce mot, ou si quelque circonstance en rappelle la mémoire, aussitôt l’image intérieure de ces lettres ainsi rappelées se superpose, si je puis ainsi dire, à l’image confuse produite par l’impression des caractères extérieurs, et la rend distincte. La voix d’un acteur que vous entendez confusément, devient distincte lorsque vous lisez ce qu’il récite. La vue des caractères rappelle les traces des sons qui leur répondent ; et ces traces se mêlant aux sons confus de la voix, les font distinguer. La peur transforme souvent de cette manière les objets qu’une trop faible lumière ne fait pas reconnaître, en objets effrayans, qui ont avec eux de l’analogie. L’image de ces derniers objets, fortement retracée dans le sensorium par la crainte, se rend propre l’impression des objets extérieurs. Il est important de se garantir de cette cause d’illusion, dans les conséquences que l’on tire d’observations de choses qui ne font qu’une impression très légère :

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