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CHAPITRE PREMIER.

Du mouvement de rotation de la terre.

En réfléchissant sur le mouvement diurne auquel tous les corps célestes sont assujétis ; on reconnoît évidemment l’existence d'une cause générale qui les entraîne, ou qui paroît les entraîner autour de l’axe du monde. Si l’on considère que ces corps sont isolés entre eux, et placés à des distances très-différentes, de la terre ; que le soleil et les étoiles en sont beaucoup plus éloignés que la lune, et que les variations des diamètres apparens des planètes, indiquent de grands changemens dans leurs distances ; enfin, que les comètes traversent librement le ciel dans tous les sens ; il sera difficile de concevoir qu’une même cause imprime à tous ces corps, un mouvement commun de rotation. Mais les astres se présentant à nous de la même manière, soit que le ciel les entraîne autour de la terre supposée immobile, soit que la terre tourne en sens contraire, sur elle-même ; il paroît beaucoup plus naturel d’admettre ce dernier mouvement, et de regarder celui du ciel, comme une apparence.

La terre est un globe dont le rayon n’est pas de sept millions de mètres : le soleil est, comme on l’a vu, incomparablement plus gros : si son centre coïncidoit avec celui de la terre, son volume embrasseroit l’orbe de la lune, et s’étendroit une fois plus loin, d’où l’on peut juger de son immense grandeur ; il est d’ailleurs, éloigné de nous, d’environ vingt-trois mille rayons terrestres. N’est-il pas infiniment plus simple de supposer au globe que nous habitons, un mouvement de rotation sur lui-même, que d’imaginer dans une masse aussi considérable et aussi distante que le soleil, le mouvement extrêmement rapide qui lui seroit nécessaire pour tourner dans un jour, autour de la terre ? Quelle force immense ne faudroit-il pas alors pour le contenir, et balancer sa force centrifuge ?