Page:Laporte - Émile Zola, 1894.djvu/18

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raire, 29 mars 1877, article Sainte-Beuve et Taine, s’est élargie, est devenue une étude anatomique des écrivains et de leurs œuvres. Elle prend un homme, elle prend un livre, les dissèque, s’efforce de montrer par quel jeu de rouages cet homme a produit ce livre. Le tempérament de l’auteur est fouillé, les circonstances et le milieu dans lesquels il a travaillé sont établis ; l’œuvre apparaît comme un résultat inévitable, bon ou mauvais, dont il s’agit uniquement de démontrer la raison d’être. Toute l’opération critique consiste à verbaliser sur un fait, depuis la cause qui l’a enfanté jusqu’aux conséquences qu’il peut avoir… La critique expose, elle n’enseigne plus… La génération actuelle des écrivains naturalistes a le malheur de ne pas avoir encore trouvé son critique. »

Un livre est un document, et chaque critique un juge qui taille, à toute plume, dans le livre, et qui tranche à pleine chair dans l’auteur, sans souci des amis ou des ennemis. La postérité aura encore trop à faire pour reviser nos jugements, même sévères, sans l’encombrer de nos éloges inutiles et de nos haines impuissantes. Pour moi, si elle me fait l’honneur de me citer comme témoin à son tribunal, je ne veux pas, par dévouement à un ami ou par peur d’un ennemi, qu’elle m’accuse d’un faux témoignage. Par ainsi, auteurs, mes chers contemporains, pour qui ou contre qui je rends témoignage, ne soyez