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poèmes civiques.

Et qui n’acceptent pas des mobiles destins
Part dans tous les succès et dans tous les butins.
Sus aux quelques badauds, fiers d’un serment unique,
Qui rêvent de leur prince ou de leur république ;
Qui font à la victoire un stupide procès,
Adorant un principe et non pas un succès ;
Qui n’en pensent pas mieux, quoiqu’il faille se taire.
Se permettant de croire en Dieu, sans inventaire,
Sans voir si ces fonds-là remontent quelque peu,
Et si la Providence est de mise en haut lieu.
Gare aux petits esprits qui n’ont pas deux morales ;
Guerre à tout pleurnicheur des causes libérales
Qui se console mal avec l’égalité,
Et d’être autant que vous se trouve peu flatté.
Guerre à cet orgueilleux, préférant, crime énorme,
Son habit, — ou sableuse, — au plus bel uniforme.
Et qu’un coup de bâton laisserait mal content,
Même quand ses voisins en recevraient autant.
Guerre aux gens attardés, murés sans perspectives
Dans les opinions les plus improductives,
Satisfaits de rester de simples gens de bien,
Et, quand vous êtes tout, heureux de n’être rien ;
Qui vivent sans galon, même sans ruban rouge,
Qui mangent du pain sec et dorment dans un bouge,
Et n’ont pas pu ce soir, — tant il faut calculer, —
Acheter pour cinq francs le droit de vous siffler.


Voilà les gros abus, ô muses très hardies !
Qu’il s’agit de pourfendre avec vos comédies.


Mais j’allais oublier les chouans des salons !
C’est le cas de monter sur nos grands étalons.