Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/106

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En elle avec l’espoir l’impatience augmente.
Elle accuse l’époux, et prie, et se lamente.


PSYCHÉ

« Viens, c’est le jour ; plus tard, tu m’auras vu mourir.
Verse en moi ton haleine, ou mon sang va tarir ;
Viens arracher mon âme à sa prison brûlante.
Oh ! pour un fiancé que ta venue est lente !
Ce trône, ce pouvoir, ces trésors tant prisés,
Toute la terre, enfin, pour un de tes baisers !
Qu’y ferais-je sans toi d’une vie inféconde !
C’était pour te chercher que j’ai conquis ce monde.
J’y manque d’air, Ô dieu ! viens et délivre-moi :
Viens, amour, il me faut ou le néant ou toi ! »

Elle dit, et son front vaincu par le pensée
S’incline, et se revêt d’une pâleur glacée.
Son corps, de ses désirs trop fragile instrument,
S’affaisse sous son poids, privé de sentiment ;
Et, telle on voit d’albâtre une frêle statue
Dans les épais gazons par l’orage abattue,
Ou tel un cygne atteint d’une flèche en son vol,
Telle, à travers les fleurs, elle gît sur le sol.