Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/253

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La violette abonde et la pervenche aux pieds
Des ceps sur la lisière aux ormeaux appuyés ;
Et plus haut, des vergers où finit la culture
La neige des pommiers argenté la ceinture.
Déjà, dans la bruyère et dans les genêts d’or,
Les taillis clair-semés, et nous montons encor.

Bientôt, de cette grotte aujourd’hui consacrée,
Légers et souriants, nous atteignons l’entrée.
Un soleil plus précoce et de plus tièdes eaux
Hâtent dans ce doux lieu les fleurs et les rameaux ;
La paix féconde y règne et mai vient d’y conduire
Tous les êtres pressés d’aimer et de produire ;
Le gazon en fourmille, et tout chargé de nids
Chaque arbre offre au printemps des hymnes infinis ;
Des baisers de l’époux la terre au loin s’enivre.
Levant au ciel son front plein du bonheur de vivre,
Belle à faire descendre un dieu pour l’écouter,
La vierge alors s’arrête et se prend à chanter :

« Soleil, ô créateur ! la terre te salue ;
L’être coule de toi, l’être vers toi reflue ;
Le monde épanoui sous tes yeux bienfaisants
Vient t’offrir un tribut riche de tes présents.
Avec toutes leurs fleurs les prés joyeux te louent,
L’arbre avec ses rameaux où mille voix se jouent,
L’onde avec la splendeur des torrents irisés,
La nue avec ses flancs de ta pourpre embrasés.
L’esprit de toute chose à tes flammes s’envole.
L’herbe avec ses parfums, l’homme avec sa parole,
Et tous avec la vie, et tous avec l’amour,
Tous t’adorent, ô Dieu qui nous fis ce beau jour.