Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/350

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HARMODIUS.

Je serai vrai, l’instant n’est pas aux longs discours,
Arme-toi de vertu, si le sort m’est contraire.
Oui, je vais attaquer Hippias et son frère !
Je veux — et ces amis sont là qui m’aideront —
Satisfaire ma haine et venger ton affront.


ISMÈNE.

Va ! je n’ai point de haine et ne sens plus l’offense,
Tu sais, toi qui connais mon cœur dès notre enfance.
Que nul ressentiment n’y dura tout un jour,
Frère, et qu’il ne partage avec toi que l’amour.
Que ce soit pour ta sœur, pour les lois elles-mêmes,
Ne t’en va pas mourir, ô frère, si tu m’aimes !


HARMODIUS.

Non, je ne mourrai point, enfant, sois sans effroi !
Je combats pour Athène encor plus que pour toi.
Je vaincrai ! je le sens à mon espoir tranquille ;
Car je porte avec moi les destins de ma ville.
Je sens qu’un grand ouvrage, en ce jour glorieux,
Sera dans notre Attique accompli par les dieux,
Que la liberté sainte en aimera l’histoire ;
Et j’augure en mon cœur une illustre victoire.


ISMÈNE.

Mon cœur ne me dit rien des volontés du sort ;
Mais je t’aime, et je tremble, et je pense à ta mort.